Résumé :
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Fondée sur l’attaque et la dérision, usant de la musique et de la danse, la satire, dans sa forme originelle antique, consiste en un poème qui dénonce les vices et le ridicule des contemporains de l’auteur. Elle vient questionner le registre de l’illusion en utilisant le mélange des genres et apparaît, dans son rapport avec l’objet perdu, comme la première forme écrite de la douleur mélancolique. L’humour part d’une dénonciation morale qui provoque la perte de la certitude, jugée ostentatoire, et déclenche un rire mêlé d’inquiétude. Dans le prolongement de la mise en évidence par Franz Kaltenbeck de la distinction freudienne entre le double, l’objet et l’autre personne, l’analyse d’une épigramme d’Horace (Odes, I, 28), où c’est le mort qui nous parle, conduit à dévoiler le lien entre la perte, le double, et ce que Lacan a nommé l’objet déchet dans la mélancolie. À l’opposé des présupposés heuristiques actuels, les textes antiques sur la mélancolie mettent en évidence l’oscillation dialectique entre une causalité matérialiste, celle du corps pris dans les affres du déséquilibre de l’humeur noire, et la désillusion de l’âme qui ouvre sur un rire (Démocrite) chargé d’un savoir nouveau. Sa rencontre avec Hippocrate constitue la scène originelle où penser le hiatus corps-psyché dans la mélancolie. La mélancolie devient dès lors une source d’enseignement inépuisable : des oppositions signifiantes comme normalité/folie, infini/fini, totalité/néant, un/rien, anticipent de ce fait la découverte de l’inconscient.
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