Résumé :
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L'histoire de ce siècle a été celle du meurtre de la langue, le ravage de toute parole humaine, sa réduction violente au grognement, au bruit et à la fureur. Oui, nous portons, dans notre propre langue, les effondrements de sens, les pétrifications de la mémoire, les traces indicibles d'un désastre collectif impensable et qui continue de marquer de son sceau chacune de nos histoires personnelles, de hanter désormais chaque souffrance singulière. La question aujourd'hui se pose, au regard des violences massives et de leurs effets déshumanisants, pratiquées au nom d'une culture mondialisée qui joue simultanément de l'uniformisation et de l'exclusion : souffrons-nous toujours de ce Malaise que Freud repérait, en 1930, comme le prix à payer pour le progrès culturel de la civilisation ? Ne serions-nous pas déjà dans un au-delà du Malaise, sous l'effet des barbaries, qui, des génocides à la manipulation du vivant à des fins eugéniques ou commerciales, se perpétuent actuellement ? Il y a en effet urgence à réévaluer cette appréciation freudienne, à l'aune de la régression éthique qui affecte l'homme en tant que sujet, et dont témoigne l'histoire contemporaine. Dans ce contexte, la psychanalyse retrouve son esprit subversif originel, en contribuant à cette force d'indignation pour laquelle, comme l'écrivait Primo Levi, il n'y a pas de congé.
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