Material Type: | printed text |
Title: | Malaise dans la pensée : essai sur la pensée totalitaire |
Authors: | / Guy LAVAL , Author / Serge LEBOVICI , Author of introduction, etc. |
Publisher: | Paris : Publi-Sud, 1995 |
Pagination: | 303 p. |
Series: | L'avenir de la politique |
ISBN (or other code): | 978-2-86600-763-8 |
Size: | 303 p. / 22 cm |
198 FF | |
General note: | Analyse in Lectures, Actualités de la Bibliothèque Sigmund Freud, 1997, n° 15 par M.-L. Roux |
Languages: | French |
Keywords : | Pensée ; Psychanalyse et politique ; Totalitarisme ; Idéologie ; Fascisme ; Racisme ; Holocauste ; HEIDEGGER, Martin ; Démocratie |
Abstract: |
Analyse par M.L. Roux parue dans Lectures, 1997, n° 15 :
Le livre, issu d'une expérience personnelle longuement élaborée, doit être lu par tous ceux d'entre nous qui s'intéressent aux rapports complexes qui unissent l'individu à la société et à la culture dans laquelle il se développe. Il pose aussi, sans toutefois les mettre directement en cause, la question des Sociétés psychanalytiques elles-mêmes et pourrait être justement médité par tous ceux qui ont en charge la transmission de la psychanalyse. Mais l'application de la psychanalyse à la pensée de la société ou de la culture ne laisse pas de poser quelques problèmes en ce qu'elle court toujours le risque de faire de la psychanalyse un nouvel idéal du Moi, voire une éthique, fût-ce celle de la raison. À cet écueil, il me semble que le livre de Guy Laval réussit à échapper, par le soin avec lequel l'auteur passe sans cesse de l'étude du socius à celle de l'individu et, en ce sens, il ne cesse de se montrer un remarquable clinicien, ce qui est sans doute, pour un psychanalyste, le plus grand compliment qu'on puisse faire. Partant du travail de deuil que l'auteur (ancien communiste et ancien lacanien) a dû faire de ses "passions idéales", le livre questionne le devenir de l'abandon de certaines positions psychiques. Mais surtout, Guy Laval interroge le rôle et la fonction des intellectuels (ou plutôt des penseurs), face aux grandes passions totalitaires qui ont si lugubrement marqué notre société européenne et occidentale née dans le moule judéo-chrétien et dans celui de la démocratie issue de la pensée grecque. En termes clairs, et dans un style parfaitement lisible, Guy Laval (s'appuyant sur Karl Popper et Socrate) montre le vacillement et le dérapage de la raison. A partir du langage d'abord : l'absence des mots de liaison, le goût pour la "fulgurance" de l'image et sa confusion avec l'agencement du raisonnement, l'utilisation d'un langage jargonnant, "scientogène" (le "lacanien" et le "parisien théorique de base" , par exemple) qui aboutissent à l'abstraction et au "formalisme réductionniste", l'esthétisme et la confusion des règles avec les apparences de la logique et surtout, la différence entre le symbolique selon Lacan (qui sous-estime la subjectivité et l'excitation) et le symbolisme chez Freud, qui est un mode de fonctionnement psychique essentiel de l'hominisation et de la subjectivation. Puis l'auteur note successivement : le rôle de l'idéal, ses liens avec le narcissisme infantile, l'absence de liaison des deux courants pulsionnels (de vie et de mort, car la référence aux deux topiques est constante ici) ; il soulignera les dangers de l'abstraction, du goût pour le non-sens et la violence "virile", qui toujours refusent les liens affect/ représentation. Guy Laval insiste sur la nécessité, pour la pensée, de garder son caractère de "plurivocité", de conserver à la désexualisation les traits de l'humain et du charnel et de ne jamais se séparer de l'"objet sensible". S'attaquant ensuite à ce qu'est la "théorie", l'auteur note que le mal est "pure création humaine" et "qu'il faut de la théorie pour faire un camp de concentration". Il ne suffit donc pas de "penser", il faut aussi débusquer dans la pensée elle-même la violence, l'absolu, l'évacuation du lien, bref la destructivité qui sait prendre tant de visages familiers. La suite de l'ouvrage amplement documenté et nourri de lectures majeures, me paraît difficilement résumable, sauf à en trahir la richesse : c'est un survol maîtrisé et informé des "différents principes qui régissent les sociétés". L'auteur examine les conditions politiques et culturelles (il précise qu'il y en a d'autres) dans lesquelles se développe la "pensée-malaise", qui se fonde sur ce qu'il avait nommé, dans la première partie, "pensée-langage". Après l'étude du nazisme, du communisme et de l'idéologie du libéralisme économique (et du nouveau totalitarisme qui nous guette avec le néo-libéralisme et la "pensée unique") Guy Laval s'attache au passage de la rationalité à la rationalisation et à la transformation d'une idée complexe en une pensée mécaniste, décomplexifiée et simplificatrice. Avec pertinence, il rappelle la nécessité où nous sommes de prendre en compte (à l'égard des médias en particulier) ce qu'il nomme "transfert social" et qui aboutit à une acceptation passionnelle des thèses des sciences humaines. Il nous convie enfin à une réflexion sur les prémisses du nazisme et sur "le grand penseur nazi" que fut Heidegger. L'intérêt majeur, selon moi, de ce développement, est de pointer, dans l'après-coup qui est celui de toute psychanalyse, le risque d'un recours trop facile à l'idée que la "pensée" sauverait de tout danger. Guy Laval montrera alors, par un aller-retour entre Heidegger et Hölderlin, la nécessité permanente de lier deux modes de pensée : logique/raison, appréhension par l' affect/langage poétique. Après un chapitre sur le fascisme italien, sur "l'espérance" qu'il souleva et sur l'importance du rôle du chef, Guy Laval nous donne un chapitre plus original sur le racisme, où il prend une position souvent "à rebours" de certaines idées : il étaye sa pensée sur le livre de Pierre Karli, L'Homme agressif, et développe l'idée que le racisme n'a nullement sa source dans l'Inconscient ou le biologique, mais n'est que la projection sur l'Autre de la haine de soi, haine non du différent mais du semblable : l'Autre est celui qui est paré de toutes les possibilités de jouissance qui nous sont refusées, ce qui lie le racisme au refus de représentation du coït parental et en donne une acception, à mon sens, plus œdipienne que narcissique, ce qu'on pourrait discuter. Dans le chapitre 11 intitulé "Du Malaise au camp de la mort", il voit le narcissisme secondaire et "la pulsion sexuelle inhibée quant au but, ce qui donne au moi la forme d'énergie nécessaire à la liaison de la pulsion de mort". Il critique l'idée trop "biologique" de la pulsion de mort chez Freud, soulignant que la haine, contrairement à ce que l'on feint de croire, n'est pas "bestiale" mais le produit de l'esprit et de la pensée. Le livre se termine sur l'énoncé des quatre stades de développement du totalitarisme qui gît en toute culture : - toute puissance de la pensée, - promotion de l'irrationnel en tant que valeur, - organisation de groupes sociaux et culturels autour de ces idées, - enfin, "le camp de concentration peut fonctionner". En conclusion, Guy Laval nous invite à nous considérer comme potentiellement capable de totalitarisme en tant même qu'êtres humains et à "rendre à la pensée sa mobilité". Il ne sert à rien de mépriser ou de rejeter la pensée totalitaire : il faut la critiquer, la discuter, l'argumenter car "raisonner, c'est tenir compte de tous les facteurs" et "la passion ne procède que de l'univoque". En terminant, je voudrais signaler que tout compte rendu, résumé comme celui-ci, n'échappe pas au danger de "décomplexification" que dénonce Guy Laval et que, donc, tout lecteur un peu sérieux se devra de se référer au livre lui-même, ne serait-ce d'ailleurs que pour en retirer tout le plaisir d'une lecture enrichissante |
Contents note: | Bibliographie |
Copies (5)
Barcode | Call number | Media type | Location | Section | Status |
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10001162 | LAV | Ouvrage | BSF Paris | Salle de lecture : Ouvrages A-Z | Available |
10001163 | LAV | Ouvrage | BSF Paris | Salle de lecture : Ouvrages A-Z | Available |
10001161 | LAV | Ouvrage | BSF Paris | ψ Réserve : Ouv. A-Z | Not for loan |
50001067 | LAV/2599 | Ouvrage | Lyon | Bib. GLPRA | Available |
06000260 | LAV | Ouvrage | St-Etienne BFP | Bib. Francis Pasche | Available |