Résumé :
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Cet article aborde la clinique de la manie en se penchant sur les « Mémoires d’un névropathe » de Daniel Paul Schreber. Lors d’une des phases de sa maladie, celui-ci décrit une phase maniaque où il se voit dans une euphorie légère, un doux sommeil morphinique, qui contraste avec la tonalité mélancolique de son état précédent. Freud évoque le même phénomène du basculement de la mélancolie dans l’état maniaque. Binswanger, de son côté, s’est intéressé à la manie dans une perspective phénoménologique qui inspirera Henri Ey pour sa théorie psychodynamique : la déstructuration du champ de conscience libère des énergies et des pulsions qui sont à l’état normal sous contrôle. Le rapport à l’objet, en tant que petit autre, abordé par Freud à propos du deuil, sera repris par Lacan pour préciser cette libération : dans la manie, le sujet n’est plus « lesté » par l’objet a, conçu comme l’objet-cause du désir. Tout alors devient marqué du sceau de l’Idéal. La libération du désir n’est plus limitée par le signifiant phallique et se voit remplacée par une quête de jouissance infinie. La voracité insatiable du maniaque laisse ainsi entrevoir la figure archaïque de la mère dans sa version de surmoi féminin cruel et tout-puissant.
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