Abstract:
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Après la Parade des impies, après la Dernière Innocence, après Contre-Champ, voilà Mlle Célia Bertin au premier rang avec un roman remarquable, Une femme heureuse. C'est, malgré toutes, les tentations de nouvelles techniques, un roman résolument psychologique, sans autre objet que de chercher une certaine vérité humaine à travers des personnages vrais, aperçus comme dans un miroir, les modèles réels n'étant que reflétés. Le roman étudie un cas très commun, dans une situation fréquente, et des caractères qui donnent tout son prix à leur analyse, en la justifiant. Mlle Célia Bertin en a fait non pas des héros de roman, mais des êtres en chair et en os, qui existent et qui existaient peut-être même avant son livre. Le plus net. le plus vigoureux de ces caractères n'est pas celui d'un des personnages du livre, mais celui de la narratrice, qui n'est pas non plus, en principe, l'auteur du roman ; et c'est de cette narratrice, mêlée en témoin au drame raconté, que l'ouvrage tient son sens, sa chaleur et son intérêt. Techniquement, puisque c'est le point de vue qui intéresse aujourd'hui le plus les jeunes romanciers, comme si la façon de dire importait plus que la chose dite, il se trouve que, sans l'avoir cherché, Mlle Bertin a renouvelé très heureusement et de la façon la plus simple l'optique et l'éclairage de son art ; les choses se présentent sur trois ou quatre plans dans son récit, où c'est la position de biais ou en retrait de la narratrice qui donne au roman son relief et ses perspectives. Emile Henriot, Le Monde, 08/05/1957
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