Type de document : | Article : texte imprimé |
Titre : | Réflexions sur un cas d'érotomanie dans la perspective freudienne du délire comme "tentative de guérison" dans la psychose (2019) |
Auteurs : | / Jessica TRAN THE |
Dans : | Évolution Psychiatrique (vol. 84, n° 1, 2019) |
Article en page(s) : | pp. 165-183 |
Langues: | Français |
Mots-clés : | Érotomanie ; Délire ; Jouissance ; Cas clinique |
Résumé : |
Objectif
L’objectif de cet article est de confronter la conception non déficitaire du délire soutenue par la psychanalyse au réel de la clinique, à partir de l’étude de la construction délirante d’une patiente érotomane. Il s’agira donc notamment de mettre à l’épreuve d’un cas clinique une hypothèse théorique freudienne, la perspective du délire comme tentative de guérison dans la psychose. Dans cette étude, nous chercherons également à montrer comment les développements lacaniens sur les formules de la sexuation et le concept de pousse-à-la-femme, conçus dans cette logique freudienne du délire comme tentative de guérison, peuvent également permettre d’éclairer certains aspects de la position érotomaniaque. Nous tenterons donc de mettre en évidence en quoi le délire érotomaniaque peut présenter des effets stabilisateurs et apaisants pour la patiente, par rapport aux composantes relevant du délire de persécution. Méthode Notre méthode impliquera dans un premier temps une revue historique de la conception de l’érotomanie dans la psychiatrie classique, afin de retracer la définition progressive de cette entité clinique dans la nosographie. Nous étudierons ainsi les premières définitions proposées par Esquirol, qui mettait l’accent tout comme Ball sur le caractère chaste des érotomaniaques et sur l’absence de désir de réalisation, pour montrer la tension qui apparaît entre cette conception et les descriptions médico-légales données par Garnier puis Portemer, qui soulignaient au contraire la dangerosité des érotomanes et le risque de passages à l’acte violents. Cette revue historique nous amènera également à étudier les spécificités des thèses défendues par De Clérambault, qui avait isolé l’érotomanie comme entité autonome et indépendante de la paranoïa, alors que la plupart de ses contemporains considéraient le délire érotomaniaque seulement comme l’une des thématiques possibles du délire paranoïaque ou à évolution systématisée. Nous présenterons ensuite les spécificités de l’approche psychanalytique du délire érotomaniaque, à partir de l’étude de la « grammaire » du délire proposée par Freud, puis des développements lacaniens sur la forclusion et les formules de la sexuation. Enfin, nous adopterons la méthodologie de l’étude de cas unique, afin de montrer les ressorts singuliers de la construction délirante chez une patiente psychotique. Résultats Les résultats de cette étude auront été de mettre au jour le caractère diachronique et progressif de sa construction délirante, à travers l’étude de l’anamnèse de cette patiente, et de déceler les aménagements singuliers et apaisants que peut parfois receler la position érotomaniaque pour un sujet psychotique, en accord avec la perspective freudienne du délire comme tentative de guérison. Nous aurons également pu montrer comment le recours à la théorie lacanienne des formules de la sexuation et au concept de pousse-à-la-femme permet d’éclairer les mécanismes de cet effet pacifiant de la composante délirante érotomaniaque. Discussion Notre discussion portera sur la possibilité d’établir une analogie entre la construction délirante de cette patiente et celle opérée par le Président Schreber, que Lacan avait qualifiée de « pousse-à-la-femme ». Il s’agira de considérer comment les aspects pacificateurs de la position érotomaniaque peuvent être conçus comme relatifs au traitement économique de la jouissance permis par une position où le sujet viendrait incarner la figure de « La femme » comme exception. La position érotomaniaque aurait ainsi des effets stabilisateurs chez cette patiente dans la mesure où elle opère une pacification du rapport à l’Autre, qui relèverait d’un consentement à se faire l’objet de sa jouissance – cette position venant en opposition dialectique avec le délire de persécution. Conclusion En conclusion, on peut souligner la pertinence clinique de l’hypothèse freudienne du délire comme tentative de guérison dans la psychose, qui permet de concevoir la construction délirante d’un sujet singulier dans une perspective non déficitaire. Les formulations lacaniennes sur les formules de la sexuation et le pousse-à-la-femme peuvent également être conçues dans le prolongement de cette conception non déficitaire. Néanmoins, nous mettons en garde contre toute portée généralisante de cette étude, dans la mesure où toutes les constructions délirantes érotomaniaques ne relèveraient pas d’un effet de pousse-à-la-femme, et n’impliqueraient pas dans tous les cas une portée stabilisatrice. Notre article aura seulement cherché à mettre au jour les ressorts de la construction diachronique de cette position érotomaniaque dans un cas singulier, mais cette étude ne doit pas occulter que toute construction délirante érotomaniaque ne présente pas nécessairement ces effets stabilisateurs. Néanmoins, dans la mesure où l’érotomanie est une composante majeure du transfert psychotique, revenir à l’étude du délire érotomaniaque par une revue de la littérature psychiatrique et psychanalytique et par l’étude du cas de cette patiente nous semble d’un intérêt fondamental, qui pourrait permettre par la suite d’éclairer la question du maniement du transfert dans la cure des patients psychotiques. |
Exemplaires (1)
Code-barres | Cote | Support | Localisation | Section | Disponibilité |
---|---|---|---|---|---|
20020000 | K04-4 | Revue | BSF Paris | ψ Réserve : Périodiques | Consultation sur place |