Type de document : | Article : texte imprimé |
Titre : | Psychotraumatisme, "réel de la mort" et travail psychique infantile sur la mort (2018) |
Auteurs : | / Mireille GUITTONNEAU-BERTHOLET |
Dans : | Évolution Psychiatrique (vol. 83, n° 2, 2018) |
Article en page(s) : | pp. 221-233 |
Langues: | Français |
Mots-clés : | Mort ; Traumatisme psychique ; Réel ; Enfance ; Transfert |
Résumé : |
Objectifs
Dans ce texte, il s’agit d’établir un lien possible entre le développement d’un psychotraumatisme chez certains sujets et la constitution, dans l’enfance, d’un savoir faisant de la mort un pur anéantissement, par lequel le sujet disparaît non seulement dans sa chair, mais aussi et surtout de la pensée de ses proches. En effet, ce savoir constitué dans l’enfance viendrait empêcher qu’advienne un processus psychique majeur : le travail sur la mort. Or, ce travail psychique, qui accompagne la découverte de la mort comme étant universelle et irréversible, constituerait une matrice fondamentale pour tout traitement psychique ultérieur des traumas, souvent envisagés comme rencontre avec le « réel de la mort », dans la mesure où il permet au sujet de s’inscrire dans une continuité qui dépasse les limites de sa seule existence. Il s’agit donc, dans ce texte, d’étudier à la fois l’importance de ce travail infantile sur la mort, les conséquences psychiques de son échec et la constitution, parfois, d’un savoir précoce sur une mort-silence, susceptible d’être actualisé lors d’un événement traumatogène ultérieur. Méthode Dans un premier temps, c’est à partir du travail psychothérapique avec deux enfants de 4 et 4,5 ans que sont présentées les différentes étapes du travail infantile sur la mort, et les processus inconscients qui le caractérisent. Puis, dans un second temps, l’évocation de deux patientes (préadolescente et adulte) permet d’appréhender les conséquences psychiques de l’échec de ce travail. Parallèlement, sont questionnées les formations psychiques singulières (position identificatoire, figures temporelles) qui accompagnent la constitution d’un savoir sur une mort sans parole ni mémoire. Résultats Face à la découverte de la mort et de ses réalités, le travail sur la mort conduit paradoxalement l’enfant à un renforcement de son sentiment de continuité d’exister. Il s’agit notamment pour lui de retraverser la position dépressive venant accompagner ce deuil par anticipation. Au final, ce processus lui permet de se situer dans une lignée générationnelle et de constituer la mémoire (la sienne et celle des autres) comme refuge narcissique par-delà la mort. Or, différentes histoires montrent que certains sujets n’ont pu se constituer un tel abri et que la mort s’est imposée à eux comme anéantissement pur, sans que rien de la vie ne puisse survivre à la mort. L’on découvre ainsi que la rencontre avec le « réel de la mort » s’impose à certains sujets comme l’actualisation de cette certitude et par conséquent comme l’assurance de leur propre anéantissement et parfois même comme la confirmation du fait qu’ils sont morts depuis toujours. Discussion À partir de ces différents éléments, on peut s’interroger en premier lieu sur les écueils que rencontre l’enfant dans ce travail sur la mort. En effet, certains ne sont-ils pas contraints de le suspendre face à un entourage qui refuse ou évite (d’autant plus si l’enfant est jeune) de parler de la mort, de sa mort ou qui l’élude par un discours religieux ? Quels effets produisent alors ces interruptions ? Engagent-elles, elles aussi, des scénarii ayant force de certitudes ? Produisent-elles des déformations temporelles ? Enfin, on peut se demander ce qui permet à l’enfant de reprendre ultérieurement ce travail pour le mener à terme ? Il serait également intéressant d’interroger les conditions qui permettent à ce travail de s’engager dans le cadre de la relation transférentielle et s’il ne surgit pas, parfois, dans l’ombre du travail qui accompagne la fin de certaines cures, bien après qu’aient pu être déconstruites les certitudes aliénantes de l’enfance. Conclusion Au fil de ces rencontres cliniques, on voit que le travail infantile sur la mort est avant tout un travail de liaison entre la vie et la mort qui participe de façon majeure au sentiment de continuité d’exister. Se constitue ainsi une matrice qui, par la suite, permettra la remise en route d’un travail de symbolisation, capable de réinscrire la temporalité dans le corps du langage, et conduisant le sujet à retrouver les limites que le trauma avait disloquées. À l’inverse, quand ce travail n’a pas pu avoir lieu, le plus souvent en lien avec une histoire familiale traumatique, se crée la certitude d’une mort qui coïncide avec une chute hors de l’espace psychique de l’autre et donc avec une pure néantisation. C’est l’actualisation de telles certitudes lors de la rencontre du « réel de la mort » qui entraînerait alors le développement d’un psychotraumatisme ; le sujet ayant subi un processus identificatoire intolérable puisqu’il se voit confirmer sa non-existence ou sa mort advenue depuis toujours, qu’elle prenne la forme d’un désinvestissement par l’autre ou, autre exemple, celle d’un meurtre. [texte de l'éditeur] |
Exemplaires (1)
Code-barres | Cote | Support | Localisation | Section | Disponibilité |
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20019362 | K04-4 | Revue | BSF Paris | ψ Réserve : Périodiques | Consultation sur place |