Résumé :
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Lorsqu'on évoque aujourd'hui Charcot à la Salpêtrière, ou ses belles hystériques en crise, l'ombre de Freud se profile aussitôt, et la psychanalyse paraît balayer ce qui n'aurait été qu'une formidable méprise. De ce que fut la querelle de l'hystérie et des débats féroces que suscitèrent, indépendamment de Freud, les essais pour en comprendre les symptômes, nous ne savons plus rien. Babinski, Bernheim ou Delboeuf font sourire, comme des trouvailles érudites pour historiens de la médecine, et leur incroyable ingéniosité n'arrête plus personne. Mais que se passe-t-il, si l'on prend au sérieux leurs observations et leurs arguments ? On s'aperçoit que l'idée banale selon laquelle Freud aurait été le seul à avoir aperçu l'énigme sur laquelle Charcot avait buté tombe d'elle-même. En lieu et place de cette Vulgate, surgit, comme le montre Pierre-Henri Castel, une multiplicité d'options épistémologiques, dont la psychanalyse a bifurqué, et qui ont chacune leur histoire : la séméiologie neurologique, la médecine psychosomatique, la théorie du psychisme morbide. Mais on s'aperçoit aussi que cette dispute médico-philosophique " fin de siècle ", apparemment obscure, a été un véritable séisme, dont les ondes concentriques se font encore sentir et ont bouleversé les représentations les mieux établies du positivisme, du romantisme et de l'individualisme libéral.
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